Vingt mille lieues sous les mers analyse

Résumé de l’histoire

1866, les bateaux du monde entier voyagent dans la crainte d’un monstre marin qui défonce et coule les navires. Une expédition s’organise et se met en chasse. À son bord, le professeur Aronnax, scientifique français de renom, Conseil, son fidèle assistant, et Ned Land, un harponneur canadien. Après de longues et frustrantes recherches sur les mers et les océans, le monstrueux cétacé est enfin en vue. Mais il est trop rapide pour le bateau qui n’arrive pas à le rattraper. Les harpons rebondissent sur sa peau dure. Impossible de le tuer. Car ce n’est pas un cétacé, c’est un sous-marin, le Nautilus. Celui-ci se retourne contre le bateau qui le pourchasse et le coule. Le professeur, Conseil et Ned se retrouvent à l’intérieur du sous-marin en qualité de prisonniers et d’hôtes du Capitaine Nemo. Et les aventures commencent…

20 000 lieues sous les mers est un récit de voyage et d’aventures scientifico-gastronomiques agréable et rapide à lire. On parcourt la planète de long en large, toujours sous les eaux. Ce sont 7 mois de voyage contés en moins de 200 pages. Nos personnages vivent énormément d’aventures palpitantes racontées très rapidement. C’est un catalogue de paysages, d’animaux, de poissons et de plantes qui se déroule sous nos yeux. Le professeur et son assistant les nomment tous par leur nom scientifique. Ensuite, la plupart du temps, ils tuent et dévorent les poissons et animaux qui croisent leur route. Apparemment, le goût de leur chair fait partie de la recherche scientifique.

Un livre écologiste

Un jour, le sous-marin croise un banc de baleines. Ned veut en tuer une pour le sport. Mais le Capitaine lui dit de ne pas le faire car sinon, l’espèce risquerait d’être en danger d’extinction. On pourrait donc croire que le livre est écologiste et très en avance sur son temps mais pas du tout. En effet, le Capitaine ajoute qu’il va massacrer tous les cachalots qui sont en train d’arriver car ce sont des animaux malfaisants et mauvais qui tuent les baleines. Le massacre a glorieusement lieu. La mer n’est plus que sang… On en déduit donc que c’est l’homme qui décide, qui a droit de vie et de mort sur la faune animale et marine, selon un jugement moral tout à fait personnel. En plus de tuer quasiment chaque nouvelle espèce d’animal par raffinement gastronomique, nos héros en tuent aussi certains par vengeance. Bel héroïsme. Par exemple, une raie électrique donne un coup de jus à Conseil qui le prend comme une offense personnelle et décide de la manger pour se venger. Elle n’était d’ailleurs pas très bonne…

Respect et amitié virile

Dans l’histoire, il n’y a que des hommes. Il n’y a pas d’histoire d’amour. En ce qui me concerne, c’est un bon point. Par contre, il y a trois relations viriles qui me paraissent ambiguës.

On peut se demander quelle est la nature de la relation entre le professeur et son assistant Conseil, toujours prêt à suivre le professeur ou qu’il aille tel un chien fidèle. Toujours prêt à sacrifier sa vie pour lui. Conseil a l’air un peu bête car le professeur moque sa manie de classifier tous les animaux. Cependant, c’est un prétexte littéraire pour introduire le côté scientifique de la chose. D’autre part, le professeur respecte Conseil même s’il lui est apparemment inférieur intellectuellement. Il a pour lui une espèce de respect et même de la tendresse. À un moment de peur, ils se prennent même la main. Jamais au grand jamais deux hommes hétérosexuels comme il se doit feraient cela. Ce petit détail m’a laissée perplexe.

Tandis que le professeur passe son temps à lire, à écrire et à parler avec le Capitaine, on peut donc se demander à quoi Conseil et le Canadien passent leur temps. De quoi parlent-ils ? Qu’est-ce qui les passionne ? Que font-ils pendant les temps morts. Car il y en a. Ce sont deux personnages bien différents. Pourtant on sous-entend qu’ils s’entendent bien. Ils discutent peut-être sagement, le torse luisant, sur leurs couchettes. Pourquoi pas? Et plus si affinité.

Enfin, le Capitaine Nemo et le professeur ont un grand respect l’un pour l’autre question intellect et courage viril. Ce sont deux scientifiques et hommes du monde. Alors, forcément ils se respectent mutuellement. Le professeur  respecte d’ailleurs de plus en plus le Capitaine au fur et à mesure qu’il apprend à le connaître… Le seul but dans la vie du Capitaine est de sillonner les mers, observer la faune aquatique et aider les pays opprimés. Mais on n’en saura pas plus sur la politique internationale de l’époque car le Capitaine n’en fait pas part au professeur qui lui-même ne peut donc nous en faire part. Cela reste un mystère mais on comprend que le Capitaine est une sorte de Robin des bois.

Nos personnages n’ont donc pas le temps de penser à la bagatelle. Cela n’a pas l’air de les intéresser ni de leur manquer. De toute manière, il n’y a pas une seule fille dans toute l’histoire. Mais il y a des garçons… Toutes ces amitiés viriles et courageuses le sont donc un peu à la manière de Walt Whitman mais sans le dire ouvertement.

La raison de la folie

20 000 lieues sous les mers est une histoire d’aventures, scientifique par-dessus le marché. Les femmes n’y ont donc pas leur place. C’est seulement vers la fin qu’apparait furtivement le portrait de la femme et de deux enfants décédés du Capitaine Nemo. Car la femme ne saurait être que mère. Morte encore mieux. Ainsi l’homme est libre d’aller et venir à sa guise, de vivre toutes sortes d’aventures et d’accomplir son grand destin. Ne serait-ce que d’aller à la pêche ou suivre son maître au bout du monde et lui tenir la main lorsqu’ il a peur.

Vers la fin du roman, la Capitaine Nemo semble de plus en plus préoccupé et montre des signes de folie. On apprend également qu’il a quitté la société humaine et la terre ferme pour vivre dans son sous-marin et sillonner mers et océans suite au décès de sa famille. C’est la raison de sa “folie”. Cela ne pouvait pas en être autrement : les femmes rendent fous.

Ici l’auteur utilise un raccourci littéraire classique également utilisé dans nombre de films et séries. En tant qu’êtres humains, la souffrance ou la mort de la femme et des enfants n’ont aucune espèce d’importance. La mort de la femme (et souvent le viol) ne sont là que pour mettre en relief la souffrance de l’homme. L’important pour l’histoire, c’est que le Capitaine en souffre.

On connaît à présent la cause de la folie du Capitaine. Un homme se doit de ne pas être émotif sous peine d’être taxé de fou. L’espoir du professeur, à la fin du livre, est que le Capitaine soit redevenu le scientifique qu’il a connu et non pas le fou qu’il est en train de devenir. C’est la bonne excuse que l’auteur a trouvé pour que notre narrateur et personnage principal en vienne à vouloir fuir et quitter le Capitaine et son sous-marin. L’auteur ne devait pas savoir comment se dépêtrer de cette amitié et de cette histoire afin de finir son bouquin. Car le Capitaine et le professeur s’entendaient trop bien et se respectaient énormément. En plus, toutes ces aventures auraient pu continuer comme ça éternellement : voir du pays, de nouveaux animaux, les manger, vivre des batailles glorieuses contre des animaux gigantesques, résoudre quelques problèmes techniques et ainsi de suite.

Retour sur la terre ferme

L’histoire se termine sur une pirouette narrative. Le professeur Aronnax, notre narrateur et personnage principal, s’évanouit au moment de l’évasion. On ne saura donc pas comment ses deux compagnons et lui se sont sortis de cette dernière aventure en plein milieu d’un maelstrom aquatique. Dans l’épilogue, il nous dira juste qu’ils ont survécu et qu’ils rentrent enfin chez eux. La curiosité du lecteur ne sera donc pas satisfaite cette fois-ci. Finalement les trois personnages retrouvent la terre ferme. Ils pourront rentrer chez eux et aller au bordel ou pas… Ned préfère sûrement la chasse et le professeur et Conseil leur études scientifiques.

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